Penda LY, Professeur de Français, présente :
L’écrivain Takia Nafissatou Fall,
Mes joies de vie, Paris,
L’Harmattan, 2010.
Comme un ciel d’hivernage, Dakar,
l’Harmattan, 2011.
CEREMONIE DE DEDICACE
Centre culturel Blaise Senghor,
Dakar, le 18 juin 2011.
Mesdames,
Messieurs,
C’est un honneur et un grand privilège pour
moi, aujourd’hui, de présenter l’écrivain Takia Nafissatou Fall et ses livres.
Ce privilège est d’autant plus grand
qu’elle aurait pu solliciter le concours de spécialistes en la
matière : d’éminents Professeurs, des écrivains confirmés, connus et
reconnus. La présence du Président Alioune Badara BEYE et celle du Directeur
Racine SENGHOR, dans cette salle, en est la confirmation. Merci donc Takia pour
cette marque de confiance.
Qui
est Takia Nafissatou Fall?
Eh bien…. Pour moi, elle est une amie, une
sœur ; « une fleur spéciale dans mon jardin ». Pour vous, elle
est la fille, la petite fille, la mère, la sœur, la compagne, la complice, la
collègue, l’amie, peut être la voisine…. Aujourd’hui, pour nous tous réunis :
poète et romancière.
L’écrivainTakia Nafissatou
Fall CARVALHO est née le 03 mai 1977 à Dakar ; mariée elle est la
mère d’un enfant. Titulaire du Baccalauréat
(Série A3) en 1994, elle quitte le Lycée Thierno Seydou Nourou Tall de Dakar et s’inscrit à l’Unité de Formation
et de Recherche de Sciences juridiques et politiques de l’Université Gaston
Berger, à Saint Louis où elle décroche une
Maîtrise de Sciences Juridiques,
Spécialité droit des collectivités locales, en1998.
En 2000, l’Université
de Limoges lui décerne un Diplôme de Troisième Cycle en Droit international de l’environnement, grâce
à une Formation à distance (Programme Université par Satellite UNISAT de
l’AUPELF-UREF).
En 2002, elle obtient un Diplôme
d’Etudes Approfondies (DEA) en sciences de l’environnement à l’Institut
des Sciences de l’Environnement, Faculté des Sciences et Techniques, Université
Cheikh Anta Diop de Dakar.
En Février 2005, elle est Diplômée de l’Ecole
Nationale d’Administration (ENA) Option Administration Générale.
Pour ce qui
est de l’expérience professionnelle :
• De novembre 2001 à février 2003 Madame FALL est Contractuelle
(juriste) à la Direction de l’Environnement et des Etablissements Classés,
Ministère de l’Environnement et de la Protection de la Nature, Dakar ;
• De juin 2005 à avril 2008,
Administrateur civil, elle occupe le poste de conseiller technique du Directeur de
l’Environnement et des Etablissements Classés ;
•
Et depuis avril 2008, elle est Chef du Bureau
de la Coordination et du Suivi, en service à la Direction Centrale des Marchés
Publics, Ministère de l’Economie et des Finances.
Depuis quelques temps, écrivain, elle
est l’auteur de:
- Recueil de poèmes : Mes joies de Vie, juin 2010.
- Roman : Comme un ciel d’hivernage, février 2011.
Takia est
alchimiste et amoureuse des mots et de la littérature…
C’est un
écrivain qui dit oui ! Oui à la vie ; oui au bonheur ; oui à
l’amour ; oui à l’amitié ; oui à la famille ; oui à la
solidarité ; oui à l’écriture, à la poésie, au roman!
Qu’en
est-il de la poésie ?
Mes joies de vie
est un recueil de poèmes très variés de formes et d’inspiration. Il est composé
de trois parties dont la première « Perles
d’eau douce » évoque l’amitié, l’amour, l’enfance, le développement de
l’Afrique et la paix dans le monde. Il contient vingt trois(23) poèmes aux
titres très évocateurs comme : « L’instant présent »,
« Ballade à travers la poésie », « L’amitié »,
« Recommencer la vie », « Flamme ravivée »...
« L’extasiée »,
deuxième partie, chante les louanges du prophète Mohamed (SAW) et constitue, à
travers quinze (15) poèmes, une déclaration d’amour et de confiance envers le
Saint homme.
La troisième et dernière partie est une
célébration de la Gloire d’Allah. Constituée de dix (10) poèmes, elle est
titrée « L’agenouillée ». Combinée à la deuxième partie, elle révèle la
dimension spirituelle de l’écrivain…
Ce recueil évoque l’espoir, la paix, la foi,
la vie et enchante le lecteur grâce à un mélange bien senti de formes aussi
diverses que le haïku, le sonnet, l’acrostiche, le verset et le vers libre.
C’est dire combien le style de la poétesse est varié et vivant. Son poème
touche le lecteur par sa musicalité, par son rythme mais aussi par ses messages
très porteurs d’espoir.
Mes
joies de vie c’est aussi quelques notes de tristesse pour manifester la
compassion et la désolation face à des situations irréversibles tels la
pédophilie, l’assassinat… pas pour nous rendre triste, juste par souci de
réalisme.
Les deux faces de la vie y sont donc
présentes : joie et peine ; avec une nette prédilection pour la
culture du bonheur. Car, pour le poète Takia, si la peine fait parti de
l’existence, l’homme doit rechercher à bien supporter la vie.
(Lecture extrait :
«Ondes positives », p41.)
Qu’en
est-il du roman ?
Comme
un ciel d’hivernage est ce qu’on peut appeler une fresque de la société
sénégalaise contemporaine qui n’a rien à envier au roman réaliste du XIXe
siècle. Le lecteur des siècles à venir comprendra facilement la société qui a
inspirée l’écriture de ce roman. Dans un style sans aucune recherche, avec une
grande simplicité, accessible à toute catégorie de lecteur, l’auteur promène
son personnage d’un espace à un autre (monde ambiant/prison), d’une situation à
une autre (épanouissement/précarité), d’un état d’esprit à un autre (naïveté/prise
de conscience) et profite de ce cheminement pour représenter les mœurs
(maraboutage, arrivisme, hypocrisie, dislocation de la cellule familiale,
immigration clandestine, exploitation de la souffrance et de la naïveté
humaine, Associations suspectes, enrichissement illicite…), les analyser, les
critiquer et proposer une nouvelle philosophie de vie. Le personnage de
Taybatou NDIAYE est ce qu’on peut
appeler une héroïne picaresque. Elle se déplace, va d’aventure en aventure et se
retrouve au cœur de plusieurs tragédies,
avant de trouver sa voie.
Résumé : Taybatou NDIAYE, vingt ans,
étudiante, épouse Moustapha DIENE, expert comptable qui la couvre d’amour et de
cadeaux. Elle adopte les amis de ce dernier et mène une vie de bourgeoise.
Après le suicide de son mari, elle découvre qu’il a détourné les deniers de la
société où il travaillait : la Mercatecnic et qu’il appartenait à un vaste
réseau de trafic de drogue. Atterrée, Tayba se retrouve seule contre tous avec
son fils ; tour à tour chassée de sa maison : Coin Eden par sa belle
famille (qui ne l’a jamais supportée) et de chez yaye Aida, sa mère. Ses
« amies » de la haute société l’abandonnent ; elle se tourne
vers son ami d’enfance, sa meilleure amie, restée fidèle malgré la
« transformation » que l’argent avait causée en Tayba. Soukeyna
l’accueille chez elle, la soutient et l’encourage à se reconstruire, à
reconstruire sa vie.
C’est alors que Tayba découvre
grâce à Internet « L’Association Nouveau Luminaire pour l’Humanité»
dont le but est de « restaurer la justice et la dignité tout en prônant l’amour du
prochain, la solidarité, la laïcité, la purification de la terre, la liberté de
religion, de pensée et d’expression »... Elle retrouve son enthousiasme et
surtout l’espoir ; elle est nommée Assistante du Président de
l’Association, Amouldine. Elle
réalisera, trop tard que celui qu’elle
considérait comme son sauveur est en réalité un homme sans scrupule, qui
profite de la détresse des gens ; un manipulateur dont elle est l’une des
innombrables victimes. Son fils Issa ainsi qu’une centaine d’autres jeunes
trouvent la mort en tentant de se « rendre clandestinement en Europe, à
bord d’une pirogue. » Taybatou découvre que c’est Amouldine qui a
encouragé et financé ce voyage macabre. Choquée, aveuglée par la haine et la
souffrance, elle assassine Amouldine et se retrouve en prison.
Veuve, paria, mère privée de son
unique enfant, meurtrière, en vie malgré tout sous ce ciel d’hivernage, elle
ouvre un journal intime qui lui offre l’ occasion de méditer sur sa vie, la
vie, le destin, la société et les problèmes de son temps : drogue,
détournement de deniers, gaspillage, solidarité, problèmes environnementaux, la
croyance aux marabouts, l’amitié… Elle médite aussi sur la religion et les différentes voies à
suivre…
Elle réalise alors la
responsabilité de la société dans toute déchéance ; elle se rend compte de
l’hypocrisie et du rôle que joue la famille dans toute chute, dans tout
échec ; elle réalise que suivre le chemin indiqué par la religion et
cultiver l’amour pour l’humanité sont des portes de sortie ; elle
s’accroche alors à ces réponses et choisit sa propre route.
Ayant bénéficié d’une grâce
présidentielle, elle se reconvertit dans la protection de l’environnement. A
quarante ans, elle a acquis la sagesse et la foi en prison ; elle a
retrouvé l’espoir qu’elle prône et elle sème l’amour autour d’elle.
Ainsi deux
parties coexistent dans ce roman : deux histoires. La première :
racontée par un narrateur met en scène le
personnage, son évolution dans le milieu familial et social, ses
déplacements dans les différents espaces de la ville (Cardaville, capitale de
Coralia) ainsi que ses expériences de la vie… La seconde partie est constituée
d’extraits du journal intime de Taybatou qui se trouve en prison. Sous le ton
de la confidence, de la confession, elle livre le résultat d’une exploration
qu’elle effectue sur sa propre conscience.
Le roman est donc celui d’une quête :
une quête de soi même, une quête de réponses, une quête d’une voie spirituelle qui
aboutit au repentir, à la réconciliation avec soi, à la renaissance ; grâce à l’écriture.
La fin de l’écriture du journal coïncide avec la fin de la quête mais aussi
avec celle du roman.
L’originalité du roman réside dans le mélange
des genres tout comme dans la dichotomie des espaces et celui des thèmes. Liberté et réclusion s’y opposent
comme le bien et le mal s’y opposent, comme s’y opposent la joie à la tristesse
ou encore l’expérience spirituelle et la vie temporelle.
(Lecture
extrait, p.79.)
Qu’en
est-il des titres ?
Titres très parlant, promesses de rêve et d’imagination
qui concordent avec leur contenu, contrairement à de très beaux titres dont le
contenu laisse à désirer.
Titres complémentaires aussi : le mystère
est connoté par le ciel d’hivernage, imprévu, imprévisible, probable, mais qui
laisse place à l’espoir, à la beauté, à la verdure…
La joie, le bonheur, c’est ce que nous
recherchons sans être certain de les trouver. Trouvés nous avons peur de les
perdre ; les livres nous suggèrent où les trouver et comment les
entretenir… Des conseils pouvant aider chacun dans la gestion de sa vie, de ses
relations, de sa spiritualité…
Le livre fait
donc sa propre publicité…
Qu’en
est-il des premières pages ?
« L’instant présent », p.14, Mes joies de vie, nous fait goûter aux
joies du moment, au cadeau que constitue la vie et nous ramène à l’ici et
maintenant ; car, pour le poète Takia, la vraie vie, c’est aujourd’hui ;
le bonheur se trouve dans de petits rien, partout. C’est une nouvelle
philosophie qui s’en dégage, une révélation, une nouvelle religion…
« La note de l’auteur »p.p.13-15, Comme un ciel d’hivernage, nous donne un
avant goût très encourageant où se perçoit l’esprit positif de la romancière
qui déclare (je cite) « même si cela n’est pas facile tous les
jours, j’essaie de cultiver en moi une âme positive. » Donc, il faut tirer
les leçons qui s’imposent et aller de l’avant ; considérer chaque
situation difficile comme une manifestation du ciel d’hivernage et voir le bon
côté qui s’en dégage…
Dès le premier chapitre, un mariage est
annoncé ; promesse de joie, de vie, de naissance, d’incertitude,
d’inconnu, d’espoir et de défis à relever ; sans cesse…
La vie du
personnage comme toute vie, en somme, est une série de gageures…
Qu’en
est-il des dernières pages ?
Le recueil se termine par un poème
d’allégeance à Dieu le Tout Puissant ; le roman se ferme sur une pensée
pieuse, un retour à Dieu et un espoir en l’avenir.
Takia
est-elle un écrivain engagé ?
Oui ! Sans
aucun doute !
A travers une analyse lucide des réalités de
son temps, elle dénonce les problèmes auxquels celui-ci est confronté ; en
particulier, la jeunesse sénégalaise. Défenseur des droits de l’enfant, elle met
en garde contre les Associations, elle dénonce le gaspillage dans les
cérémonies familiales, elle condamne l’arrivisme et s’insurge contre l’immigration
clandestine, contre le trafic de drogue et contre toute forme d’abus et de
détournement. A l’inverse, elle met en avant des valeurs telle que l’amitié, la
tolérance, la mesure, le pardon, l’endurance ; valeurs non monnayables.
Elle s’érige en protectrice de l’environnement, à l’ère du dérèglement
climatique et de la menace de disparition d’espèces et d’éléments naturels
vitaux. Elle prône la reconstruction et l’unité africaines. Engagée, patriote
et foncièrement positive _ elle nous le communique d’ailleurs_ telle est l’écrivain
Takia Nafissatou Fall.
Ce que j’ai apprécié
·
Le recueil :
-
Variété des formes
-
Richesse des thèmes
-
Originalité et audace du style
-
Simplicité de la langue
-
Sonorités et images…
·
Le roman :
-
Simplicité de l’histoire et de
l’expression
-
Originalité des noms/propre et des lieux
(Amouldine, Coralia, Cité des Acajous, Cité des Cocotiers, Allée des
Citronnelles…)
-
Diversité et subtilité thématique
-
Interférence linguistique
-
« Wolofisation » du français
(«lavage des mains, « aujourd’hui, c’est aujourd’hui », « jeune
fille » : bonne, « la vie a de longues jambes »…
-
Exploration à travers l’écriture d’un
journal
-
Sérénité du personnage à la fin…
-
Humanisme de l’auteur, en filigrane
Ce
que j’ai tiré :
-
La persévérance, l’amour, la sincérité
et la foi comme codes de conduite
-
L’attention et la vigilance pour limiter
les dommages à chaque fois que c’est possible
-
…
Je terminerai en te souhaitant Madame Fall une longue vie et
une très belle carrière d’écrivain. Tu as manifestement beaucoup de talent, ma
chère Takia. Héritière de grandes voix de la littérature africaine francophone
(Annette Mbaye D’Erneville, Mariama BA, Amininata Sow FALL, Miryam W. Vieyra,
AssiaDjebar…), tu as capitalisé et repris des thèmes classiques que tu as su
approfondir et adapter à l’actualité.
Tes livres apportent des réponses à nos
interrogations sur notre quotidien et ils ouvrent les portes de la vie, aussi
bien au travailleur stressé, à la mère qui plie sous le poids des
responsabilités familiales et sociales, au père qui court à gauche et à droite
en quête de pitance pour sa progéniture qui espère tous les jours manger à sa
faim, à l’étudiant, à l’élève, à une jeunesse désœuvrée en proie aux mirages et aux promesses de
charlatans avides de gain (de toute nature) .
Cher public,
nous avons donc entre nos mains
-
Un recueil de poèmes empreint d’humanisme
-
Un roman très actuel et engagé
-
Un écrivain à l’écoute de soi et des
autres
-
Des recommandations et des suggestions
-
Des questions résolues
-
Des joies de vie sous un ciel
d’hivernage !!!
Je vous remercie
de votre aimable attention !
Centre culturel Blaise Senghor,
Dakar, le 18 juin 2011.